Madame la Ministre,
Alors que les déplacements dans l’espace public reprennent peu à peu, le harcèlement sexiste de rue, peu importe sa forme, n’a quant à lui jamais cessé. Des comportements tels que des regards insistants ou des attouchements impactent lourdement le rapport qu’ont les femmes à l’espace public.
Le 19 février dernier, l’Agence européenne des droits fondamentaux a publié un rapport objectivant le phénomène. Celui-ci démontre que 80 % des jeunes femmes européennes évitent certains lieux ou quartiers par crainte pour leur sécurité. Ce constat met en évidence plusieurs choses. D’une part, un problème flagrant d’égalité quant à l’utilisation de l’espace public par les femmes. D’autre part, la lutte contre les comportements sexistes est rendue difficile pour nos services de police de par le manque de preuves. En effet, de nombreuses femmes voient le non-aboutissement de leurs plaintes comme un échec, ce qui a hélas pour conséquence de les décourager à porter plainte.
Comme vous le savez probablement, la police de Liège a mis en place le projet « Lutte contre le sexisme et le harcèlement de rue » qui a pour objectif d’aborder ce phénomène par une approche globalisante. Au cours des différentes actions menées, 26 personnes ont été interpellées et 16 procès-verbaux ont été dressés. Le Parquet de Liège a quant à lui vu de manière positive ces actions et a garanti une suite appropriée aux procès-verbaux réalisés.
Dès lors, Madame la Ministre, mes questions sont les suivantes :
– Que pensez-vous du projet mis en place à Liège ?
– Une généralisation de ces actions dans l’ensemble des zones de police ne devrait-elle pas être envisagée ?
– Des projets similaires à celui de Liège pourraient-ils être mis en place dans d’autres villes belges dans le cadre d’une phase de test, afin d’en évaluer de manière plus large les plus-values ?
D’avance je vous remercie pour vos réponses,
Julie Chanson
Réponse de la Ministre Verlinden du 24/02/2021
Il va sans dire que l’intimidation sexiste en rue est un comportement inacceptable qui ne peut et ne doit en aucun cas être tolérée. Les chiffres du dernier Moniteur de sécurité de 2018 révèlent effectivement que les femmes se sentent beaucoup moins en sécurité que les hommes dans l’espace public. Pas de surprise! Ainsi, elles ne sortent de préférence pas dans le noir, évitent de prendre les transports en commun et de participer à des événements très fréquentés.
En ce qui concerne l’action très concrète prise à Liège, il s’agit certainement d’une bonne initiative. Cependant, il me paraît utile de rappeler que les actions de proaction et de prévention pour éviter ce type de comportement sont également tout aussi importantes. Il ne faut donc pas se limiter à une réaction uniquement policière mais appréhender la problématique en faisant intervenir d’autres acteurs de la société tels que ceux de la prévention et de l’enseignement par exemple.
Dans le cadre du projet mis en place par la police de Liège, des actions se sont déroulées à différents moments de la journée et dans différents lieux connus pour favoriser ces comportements comme le centre-ville et les parcs publics. Votre demande de généraliser ces actions à toute zone de police et de lancer davantage de projets pilotes est dans ce cadre certainement justifiée. Pour autant, comme je l’ai dit, cela ne se limite pas uniquement à une réponse policière.
Par ailleurs, la Direction générale sécurité et prévention a publié le guide Genre et espace public en 2020. Ce guide se base sur une politique de prévention qui vise à réduire le sentiment d’insécurité des femmes dans l’espace public. Le guide vise à encourager les autorités des villes et communes à intégrer la dimension du genre dans leurs projets de développement de leur ville, commune ou quartier. Le guide reprend également quelques exemples de campagnes de prévention nationales et internationales.