Madame la Ministre,
Suite à la Boum 2 organisée le samedi 1er mai au Bois de la Cambre et à la répression policière qui l’a accompagnée, plusieurs citoyens présents lors de l’évènement m’ont interpellée.
Certains de ces citoyens étaient des manifestants pacifistes et ont été choqués par l’attitude de la police à leur égard. Si le choix de participer à cet évènement est évidemment entièrement discutable, il n’en demeure pas moins que des familles, des mineurs en ce-compris, ont été molestés par nos forces de l’ordre. Cela ne peut être pris à la légère.
Plus grave, d’autres citoyens, pourtant simples promeneurs sans aucune intention de participer à l’évènement, semblent avoir été pris à partie par la police. Le Bois de la Cambre doit rester un lieu de promenade, nous ne pouvons donc pas tolérer que tous les passants soient considérés comme parties-prenantes à l’évènement.
Madame la Ministre, mes questions sont donc les suivantes :
– La répression policière lors de l’évènement La Boum 2 était-elle bien proportionnée ?
– La presse fait état de 700 policiers pour environ 1500 personnes, est-ce exact ? N’était-ce pas excessif ?
– A Liège, 1000 personnes se sont rassemblées et nous n’avons pas du tout observé les mêmes scènes de violence. Comment expliquer cette différence ?
– La police n’aurait-elle pas pu davantage différencier les manifestants violents, les manifestants pacifistes et les simples promeneurs ?
– A combien estimez-vous d’ailleurs la proportion de manifestants violents parmi les manifestants pacifistes ?
– Enfin, comment abordez-vous une éventuelle Boum 3 ?
D’avance je vous remercie pour vos réponses,
Julie Chanson
Réponse de la Ministre Verlinden du 05/05/2021
Il est compréhensible que plus d’un an après les premières mesures mises en place pour lutter contre le coronavirus, la population ait envie de se retrouver et de faire la fête.
Mais il est inacceptable que cela se fasse dans des circonstances telles que nous les avons connues ce samedi au Bois de la Cambre. L’absence de respect des mesures sanitaires et la violence dont bon nombre ont fait preuve envers les services de police sont inadmissibles.
Certaines personnes trouvent ces violences contre la police justifiées parce que les policiers étaient en nombre et en uniforme mais je ne cautionne pas un raisonnement aussi simpliste. Les jours précédents, nous avons exhorté les jeunes à ne pas se rassembler et nous avons invité les parents à surveiller leurs enfants. Le jour même, nous avons encore pris des mesures de prévention : présence de stewards dans le Bois de la Cambre, patrouilles de policiers en civil, etc.
Ce n’est qu’après l’éclatement de bagarres entre les participants et le lancement de projectiles en direction de la police que celle-ci est intervenue, non sans avoir adressé plusieurs sommations.
Une quinzaine de participants et dix policiers ont été blessés. Douze personnes ont été envoyées à l’hôpital, dont quatre policiers qui sont rentrés chez eux depuis.
Nous examinons la possibilité de nous constituer partie civile pour tout acte de violence commis à l’encontre d’un membre de la police fédérale.
Les services de police ont procédé à 132 arrestations, dont 127 administratives et 5 judiciaires. Des dégâts ont également été commis sur des véhicules de police.
Le bourgmestre de Bruxelles s’est expliqué sur sa décision de ne pas fermer le Bois de la Cambre, vu l’impossibilité de rendre celui-ci hermétique et pour permettre à la population de profiter dans le respect des mesures sanitaires de cet espace vert, comme elle en a le droit.
Ce qui s’est passé samedi au Bois de la Cambre est un parfait exemple de ce que peut donner un appel mal intentionné à se rassembler lancé sur les réseaux sociaux. La surenchère médiatique et la publicité donnée à l’événement n’ont certainement pas contribué à un déroulement paisible.
Un appel sur les réseaux n’est pas une demande d’autorisation et induit des risques de débordements. Si le nombre, le profil, les intentions des participants ont échappé au contrôle des lanceurs de l’appel, ceux-ci ne sont pas pour autant exonérés de leur responsabilité: j’invite le ministre de la Justice à ne pas laisser les faits impunis.
Un dispositif conséquent a été prévu pour gérer les événements du 1ermai, sur la base des analyses de risque de la police. Une structure de commandement unique a été mise en place sous la coordination du chef de corps de la zone de police Bruxelles-Ixelles. Ce dispositif impliquait plusieurs zones de police bruxelloises et la police fédérale. Les autres événements encadrés par ce même dispositif n’ont donné lieu à aucun incident.
Au Bois de la Cambre, la police n’a cessé de communiquer, d’abord de manière préventive puis dissuasive. Une heure avant l’intervention, des annonces par la police ou par drone ont averti le public de son imminence. Tous ont eu l’occasion de quitter les lieux avant l’intervention de la police visant à disperser les éléments violents. Il est difficile d’estimer la proportion de ces derniers à partir du moment où les personnes restées sur place ont pris le parti de s’opposer à l’intervention de la police.
Il appartient aux autorités locales et à la police locale de discuter avec les organisateurs afin de prendre les mesures nécessaires au bon déroulement de l’événement. J’ai invité le collectif l’ABÎME à s’adresser à ces instances: je n’ai reçu aucune réaction.
Les gens ne se sont présentés à moi qu’après avoir été convoqués par la police. Nous les avons dirigés vers les autorités locales qui sont à même de traiter toute demande de ce type.
Mes services surveillent la présence éventuelle d’extrémistes ou d’émeutiers. En ce qui concerne l’extrémisme, l’OCAM effectue une analyse de la menace sur base de toutes les informations disponibles et détermine également le niveau de menace. Pour l’ordre public, la police procède à une évaluation de la menace.
Les informations dont nous disposons actuellement ne confirment pas la présence de groupes spécifiques lors des événements.
L’analyse étant en cours, on va sans doute encore identifier l’un ou l’autre fauteur de troubles. Plusieurs des personnes identifiées sont déjà connues des services de police.
L’analyse de risques a non seulement révélé des dangers potentiels pour la santé publique, mais surtout le risque de violences. Une intervention musclée de la police était devenue inévitable après le lancement de projectiles contre la police, à l’issue de rixes entre fauteurs de troubles.
La demande de retirer l’événement de Facebook a été introduite dès que possible mais les formalités prennent du temps. La Ville de Bruxelles s’est exprimée à travers les médias, a mobilisé des stewards pour faire œuvre de prévention dans le Bois, a fait apposer des messages préventifs le long des voiries. La police a communiqué via les médias traditionnels et les médias sociaux. Les véhicules de police et les drones ont émis des messages standardisés, ont prévenu de l’intervention imminente et ont demandé à la foule de se disperser.
Depuis le début de la crise, les services de police doivent faire face à un mécontentement croissant et à la montée de la violence. Je leur affirme ici mon soutien et je les remercie de leurs efforts.
Une enquête interne a été lancée pour établir la clarté par rapport aux images. La zone de police Bruxelles CAPITALE Ixelles a déjà expliqué hier le contexte exact par rapport aux images partielles. Je ne peux qu’attendre les résultats de l’enquête.
Une demande a effectivement été soumise pour l’organisation de La Boum3. Sur la base des informations –limitées –nous pouvons penser que celle-ci s’annonce comme une action de protestation et non comme un événement test. L’analyse de la demande doit encore avoir lieu, ce qui ne me permet pas d’évoquer déjà des mesures.
Il revient en premier lieu aux autorités administratives locales d’autoriser des événements sur son territoire. Dans un premier temps, nous avions communiqué qu’il n’était pas encore possible aujourd’hui d’autoriser des événements réunissant beaucoup de monde. L’arrêté ministériel du 8 mai 2021 permet l’organisation d’événements en extérieur réunissant 50 personnes et des événements tests peuvent être organisés sous condition. Il n’est pas permis d’organiser soi-même un événement test.
Un rassemblement de 1000 participants est actuellement interdit. Je suis prête à expliquer aux organisateurs de La Boum les conditions d’un événement applicables à tous, mais je ne vais pas négocier les règles.
Un formulaire de demande spécifique est disponible pour les événements tests. J’ai la possibilité d’approuver certains projets tests et pilotes sur la base d’un avis motivé de l’ensemble des instances concernées, des ministres compétents et de l’autorité locale.
Nous continuons bien évidemment à prendre des initiatives en vue d’améliorer la relation entre les jeunes et la police, même si la crise sanitaire complique la tâche. Il y a par ailleurs la campagne nationale « Respect », dans le cadre de laquelle nous nous concentrons non seulement sur la communication, mais également sur la diversité au sein de la police.
Il est positif que les administrations locales développent, conjointement avec les autorités de police et le parquet, une approche pour la lutte contre les bandes de jeunes bruxellois. Je suis certainement disposée à y collaborer.
Il est important de continuer à mener le combat contre le virus. Je me réjouis que des perspectives soient enfin offertes à partir du 8 mai.
La réouverture de l’horeca, et, sous réserve de l’autorisation des autorités locales, des événements culturels et des compétitions sportives professionnelles pour être organisés en plein air avec un public assis de 50personnes dès samedi. J’espère que cela fera patienter la population avant de retrouver une vie normale.